"Le Liberte"
Il fut de ces hommes qui, sans avoir l'air d'y toucher, se
trouve modestement où tout se passe, à la croisée
de deux passions, deux manières de vivre étroitement
mêlées, la peinture et la mer.
Il fut marin et peintre peut-être était-ce bien l'inverse
sillonna toutes les mers du globe, ou peu s'en faut, une drisse dans
une main, un crayon, un pinceau dans l'autre
Et dieu sait si la mer s'y entend pour vous faire sentir l'événement
!
Peintre de la Marine, ce sont choses de marins qu'il peint en rendu
saisissant, associant une technique sans faille à une vision
très juste et rudement sentie.
Genre très spécifique que celui de la peinture de marine,
et qui échappe souvent à la peinture
Il suffit d'un coup d'il sur ces aquarelles gouachées,
en une " drôle de cuisine ", pour se convaincre que
Marin Marie accomplit magistralement cette double osmose de la mer
et de la peinture, l'une dans l'autre et inversement.
Marin Marie, dilletante d'instinct professant le talent , touchant
ça et là à ce que bon lui semble y laissant sa
marque indubitable surtout, emplissant son bissac d'expériences
fort vécues, mais détestant l'à peu-près
et le manque de goût pour la chose bien faite une fois entreprise
Ce serait oublier qu'aussi il est peintre, et qu'histoires de mer
et de bateaux il en eut d'autres à son actif
Ce serait oublier qu'il parvint à se faire un métier,
une existence, de ces deux passions conjuguées.
Ce serait oublier qu'il n'avait sont pareil pour conter ses histoires,
en quelques traits bien sentis comme coups de crayon, forte stature
à l'appui de son dire, l'éternelle cigarette au coin
des lèvres battant la mesure.
Sa première exposition dans le cadre de Beaux Arts de la Mer,
sous le patronage de Charcot, remporte un franc succès. Son
talent est vite reconnu, son caractère définitivement
bien trempé
En 1935, il est nommé peintre officiel de la marine par le
ministre Pietri.
Il est dés lors définitivement ancré dans sa
double vocation. L'après guerre le verra voguer de croisière
en croisière, de commande en commande, d'exposition en exposition
Il devient membre de l'Académie de Marine, reçoit la
Légion d'honneur, distinctions qu'il accueille en toute simplicité
des gens de mer.
En 1969, il fait le voyage en Polynésie, à bord de la
Vaitere sillonne les îles sous le vent jusqu'à Bora Bora,
où il s'installe pendant quelques semaines chez un autre peintre,
son fils Yves de Saint-Front.
Empreinte du savoir faire qui est le sien, de sa connaissance intime
de la mer, sa vision des lagons polynésiens tranche naturellement
avec les images conventionnelles, rebattues, auxquelles sans doute
nous sommes trop habitués, pour lesquelles il n'avait aucune
inclination.
En 1989, deux ans après sa mort, le Musée de la Marine
lui consacrera une grande rétrospective où seront exposées
plus de cent uvres, gouaches et aquarelles, aquarelles gouachées,
car entre toutes , c'était la peinture à l'eau qu'il
préférait, à "l'eau salée
"
ainsi que put le dire l'un de ses amis.
A Tahiti, le musée Gauguin lui consacra une exposition de 1996
à 1997.
En collaboration avec Yves de Saint-Front, fils de l'artiste et peintre
lui-même, le musée Gauguin a fait tirer trois séries
de cent cinquante exemplaires numérotées et estampillés
de trois estampes rehaussées à la main : Paysage de
Bora Bora, La Vaitere au large de Bora Bora et le Mariposa au mouillage
dans le lagon de Bora Bora disponibles au musée Gauguin à
Papeari, à la Galerie Api à Moorea, à la galerie
Reva Reva et à la galerie du Vaima à Papeete.
A voir aussi : Matisse
à Tahiti